Gaza : communiqué et commentaires
Gaza : La France doit agir pour consolider le cessez-le-feu (AFPS)
L’annonce d’un « cessez-le-feu illimité » a été aussitôt accueillie à Gaza et en Cisjordanie par des scènes de liesse populaire. Cela traduit l’aspiration profonde à la paix du peuple palestinien en lutte pour sa liberté.
A ce stade, le cessez le feu est fragile et, si des premiers résultats sont annoncés (ouverture des passages pour l’aide humanitaire et la reconstruction, doublement de la zone de pêche), la situation n’est en rien réglée : c’est dans un mois que la levée du blocus sera véritablement abordée au fond. Le bilan de cette agression est très lourd : 2137 morts, plus de 11000 blessés, une population réduite à des conditions extrêmes de survie, des destructions massives d’écoles qui vont retarder la rentrée scolaire … Et au lendemain de la signature du cessez-le-feu, la répression continue comme à l’ordinaire en Cisjordanie.
La question si essentielle pour les Gazaouis de la levée du blocus ne pourra être dissociée de l’ensemble du dossier israélo-palestinien. Rien n’indique que Netanyahou ait en quoi que ce soit modifié son point de vue depuis son sabotage des « négociations » au printemps, sabotage permis par l’absence de réactions internationales. Il va une fois de plus jouer la montre et chercher à prolonger indéfiniment le « statu quo » pour poursuivre la colonisation et l’occupation.
Il est donc impératif, si on veut qu’enfin les Palestiniens de Gaza retrouvent un début de vie « normale » et qu’on aille du cessez-le-feu vers une paix conforme au droit, qu’il y ait une implication extérieure forte. Faute de quoi on retombera vite dans ce statu quo insupportable qui écrase les Gazaouis depuis plus de sept ans, permet le développement sans fin de la colonisation et entraînera inévitablement de nouvelles victimes. Israël a démontré par le passé qu’il n’accorde aucune valeur à ses propres engagements, l’allègement du blocus et l’extension de la zone de pêche, promis lors du cessez-le-feu de 2012 et jamais mis en œuvre, sont là pour le rappeler, tout comme l’arrestation d’une soixantaine de personnes précédemment libérées dans le cadre de l’accord dit « Shalit ».
La France qui avec ses partenaires européens se dit prête à s’engager pour contribuer au règlement du conflit - et qui vient pour la première fois de fixer la levée du blocus comme objectif - ne peut esquiver sa responsabilité. Elle doit réparer les conséquences désastreuses du communiqué de F. Hollande du 9 juillet qui prenait fait et cause pour les dirigeants extrémistes israéliens en ignorant la souffrance de la population palestinienne et user de tous les moyens diplomatiques, politiques et économiques pour empêcher Netanyahou de saboter les fragiles espoirs d’aujourd’hui.
Cela suppose d’oser enfin utiliser l’arsenal de sanctions dont elle dispose, y compris pour ce qui la concerne la suspension de l’accord d’association UE-Israël. Elle doit en même temps faire clairement savoir aux dirigeants israéliens que l’ère de l’impunité est terminée et que les responsables des crimes de guerre devront en répondre.
Sébastien Boussois : "Le Hamas sort totalement gagnant de la guerre"
Après cinquante jours d’une guerre sanglante qui a fait 2 140 morts côté palestinien, 69 côté israélien, Israël et le Hamas ont finalement conclu un cessez-le-feu, entraînant un allègement du blocus de Gaza. Chercheur associé à l’université libre de Bruxelles et au Centre Jacques-Berque (CNRS-Rabat), Sébastien Boussois vient de publier Gaza : l’impasse historique (Éditions du Cygne), livret indispensable apportant toutes les clés pour mieux appréhender ce tragique conflit et ses conséquences. Dans une interview au Point.fr, le spécialiste du Proche-Orient explique pourquoi le mouvement islamiste peut se targuer auprès de sa population d’avoir remporté la guerre.
Les termes du cessez-le-feu conclu le 26 août paraissent bien faibles à l’aune des pertes humaines...
Les éléments négociés au Caire peuvent être considérés aujourd’hui, en l’état, extrêmement importants même s’ils sont symboliques, comme ils l’étaient en 2009 et en 2012. Toute trêve apporte son lot d’espoirs. La levée du blocus et l’ouverture des deux postes-frontière avec Israël, c’est quelque chose que le Hamas demandait depuis un mois, et que les Palestiniens exigent depuis sept ans. On connaît les conséquences de ce blocus sur le plan humanitaire. On se dirigeait tout droit vers un dramatique scénario à l’irakienne, avec des générations de jeunes gens frappés par les sanctions occidentales.
Le blocus de Gaza n’a pourtant pas été entièrement levé...
Un assouplissement du blocus constitue déjà une avancée importante. Les Palestiniens peuvent pêcher dans une zone plus vaste, ce qui leur permet de récupérer les poissons qui leur appartiennent. Il faut voir maintenant si les mesures d’assouplissement vont évoluer.
Israël affirme qu’une levée intégrale du blocus permettrait au Hamas de se réarmer. Est-ce vrai ?
C’est une possibilité, dans l’absolu. Mais la question est de savoir si, dans l’hypothèse d’une levée du blocus, le Hamas conserverait pendant cinquante ans sa volonté de détruire Israël, ou s’il se normaliserait, comme l’Autorité palestinienne, qui a abandonné la lutte armée au profit de la résistance pacifique.
Israël a perdu la guerre à Gaza mais le combat pour la justice continue (Ali Abunimah)
Il y a une raison claire de célébrer l’accord de cessez-le-feu conclu aujourd’hui entre Israël et la résistance palestinienne : 51 jours et nuits de destruction et de massacres incessants de la part d’Israël se sont achevés à Gaza.
Avec l’annonce qu’Israël avait accepté de réouvrir les frontières de Gaza, Hamas a proclamé la victoire et les Palestiniens, en particulier à Gaza, sont en train de la célébrer. Chez beaucoup d’Israéliens, pendant ce temps, il y a un sentiment d’amertume et de défaite.
“Ce que Netanyahu et ses collègues ont amené sur Israël, dans un conflit entre l’armée la plus forte de la région et une organisation de 10 000 personnes, n’est pas seulement une défaite. C’est une débâcle”, écrit Amir Oren d’Haaretz, admettant ainsi de façon étonnante la dimension du revers subi par Israël.
Quelques observateurs traitent les derniers événements avec une précaution compréhensible.
“Je ne me sens pas d’humeur à me réjouir, je suis seulement content qu’il n’y ait plus de morts parmi les gens, les enfants”, m’a écrit l’écrivain de Gaza Omar Ghraieb.
À part les plus de 2100 morts, “tant de gens ont été blessés, des maisons bombardées, des tours rasées, la vie déformée”, a ajouté Ghraieb. “Je préférerais juste voir de près ce qui attend Gaza”.
Israël a effectivement une longue histoire de violations d’à peu près tous les accords jamais signés avec les Palestiniens, depuis les accords d’Oslo en 1993 jusqu’aux précédents cessez-le-feu à Gaza.
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